Lettre ouverte à Monsieur
le Président de la République
Monsieur le Président, à
quand une politique économique de justice sociale?
En France, plusieurs courbes permettent d'ausculter
et de juger de la santé économique du pays. La courbe de fréquentation des
restaurants du cœur et celle de la richesse des foyers les plus riches et des
entreprises du CAC 40 ou celle du nombre des millionnaires ne cessent de
croître. Parallèlement, la courbe du chômage croît légèrement ou se maintient
sur un palier qui atteste du nombre élevé de chômeurs dans notre pays.
Vous et vos ministres de l'économie et du travail
nous répétez à longueur de journée que la courbe du chômage s'inverserait avant
2014. Mais, malgré des contrats aidés - si louables soient-ils -, la courbe reste
coincée autour de 11% de chômeurs, alors que nous venons d'enterrer l'année
2013.
Le chômage des seniors de plus de 50 ans poursuit sa
hausse (+ 11,7% en un an). Le nombre de chômeurs de longue durée continue
d'exploser: 2 035 300 sont inscrits à Pôle emploi depuis plus d'un an (+ 13,4%
sur un an) et 582 000 depuis trois ans ou plus (+17,4%) (Editorial du quotidien
Le Monde du 28 novembre 2013).
Tout porte à
croire que le chômage devrait même repartir à la hausse à la mi 2014 après
quelques mois de stabilisation.(1)
Logique. La Bourse de Paris bat des records, les
actionnaires et les institutions financières s'en mettent plein les poches et
la politique économique capitaliste ultra libérale, conduite depuis 2012 - la
même que celle conduite par Balladur et Chirac - ne permet pas d'injecter un
peu de justice sociale dans l'économie du pays qui en a tant besoin.
Incapable de résoudre le chômage, le gouvernement
s'adonne à la méthode Coué: elle s'inverse, elle s'inverse! Il y a certes un
ralentissement de la hausse du chômage, mais c'est toujours une hausse. Et la
précarité augmente.
En 2012, vous avez été élu sur la base d'une
politique économique fondée sur la croissance et la justice sociale. Mais vous
poursuivez en fait la même politique économique que votre prédécesseur Nicols
Sarkozy. En effet, le pouvoir donne l'impression d'obéir aveuglement à la
politique des instances européennes, au service des marchés financiers, des
banques centrales européennes et outre atlantique, qui imposent leur loi.
Des milliards d'euros ont conflué vers les banques
en faillite. C'est la plus grande opération d'"assistanat" depuis la seconde guerre mondiale. Actuellement
une deuxième vague d'"assistanat"
fait confluer un flux ininterrompu de richesses du pays vers des entreprises
qui continuent à délocaliser, à licencier ou à boursicoter sur les places
boursières mondiales.
Sous une appellation fallacieuse, telle que
"Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi" (CICE), les
entreprises sont financées par des ménages déjà en grande difficulté. C'est la
"TVA sociale" de Nicolas Sarkozy qui revient. C'est du pillage
programmé et constitutionnel!
Conséquences: afin d'offrir 10 milliards d'euros aux
entreprises en 2014 (20 milliards d'euros en 2015), le taux de TVA - qui
concerne la majorité des biens et des services, puisqu'il couvre 55% des
produits de l'indice des prix de l'Insee et un quart des service - va augmenter
de 19,6% à 20%.(2)
Va-t-on sortir de cette croissance atone et du
chômage de masse qui empoisonnent la vie de nos concitoyens? Rien n'est moins
sûr. La zone euro n'est pas à l'abri d'une nouvelle crise financière. "Il y a une sorte de course entre
l'amélioration de l'économie et l'augmentation des taux d'endettements publics
qui atteignent par exemple 134% du PIB en Italie." Et 95% du PIB en
France. Pour l'heure, les marchés financiers ne s'en soucient guère. Jusqu'à
quand?(3)
Les même causes produisent les même effets. Le
capitalisme financier ultra libéral a déjà causé des dégâts innombrables. Le salut
du pays serait de prendre le virage vers une économie de soutien à la
consommation et à la justice sociale. C'est aussi l'intérêt des entreprises qui
profitent bien de vos largesses.
(1) David Revault d'Alonnes- Le
Monde du 28 novembre 2013.
(2) Anne Eveno - Le Monde du 31
décembre 2013.
(3) Claire Guélaud- Le Monde du 1er-2 janvier 2014.